8
MAI
2011
Cérémonie du 8 mai – Discours au Monument Mémoire et Paix
Chers amis,
Ces cérémonies sont de plus en plus indispensables. Vous connaissez cette théorie qui face à l’accélération du temps, au rétrécissement du monde, au tumulte de la vie, revendique la slow life, une existence tranquille, loin des ambitions et des informations.
Il y a trois siècles, les Européens les plus éclairés avaient mis deux ans grâce à Voltaire à découvrir que 300 000 personnes étaient mortes dans le tremblement de terre de Lisbonne. Nous, vieillards ou enfants, lecteurs ou indifférents, nous avons appris en seulement vingt semaines la triple catastrophe du Japon, séisme, tsunami ou nucléaire 30 ans après Tchernobyl, le printemps des peuples arabes autant social que politique et peu religieux, la mort de Ben Laden dix ans après le World Trade Center que nous avons appris vingt minutes après qu’elle ait eu lieu par un Twitter. La violence des éléments, la violence des dictatures et la violence de la barbarie terroriste.
Cela doit nous amener à ré-apprécier ce que nous possédons : la liberté et la démocratie. Notre communauté doit apparaître comme un refuge pour l’unité.
L’idée de la guerre s’est éloignée dans notre pays. La mort du légionnaire Rodolfe Egg vendredi a ramené le nombre des compagnons de la libération à 35. Un homme, né en 1923, qui avait connu ces temps, un homme dévoué à la ville et l’ARACA, Pierre Charon nous a quittés voici quelques semaines, nous étions beaucoup ici à l’apprécier. Les survivants ont pour la plupart plus de 90 ans et leurs rangs s’éclaircissent. Le Général de Gaulle est mort il y a 40 ans, François Mitterrand qui avait connu la campagne de France, la captivité, l’évasion, la situation complexe des français sous l’occupation, puis la Résistance et la Libération, a été élu voici trente ans et nous le fêterons le 10 mai prochain. A 80 ans passés, le Président Giscard d’Estaing est le dernier de nos chefs d’Etat à avoir combattu durant la seconde guerre mondiale. Plus que sur la présence de ces hommes, de ces soldats, de ces braves ou de ces victimes, c’est sur notre souvenir qu’il faut compter pour honorer l’Histoire de France et donc sur ces cérémonies.
Pourtant la guerre, dans ses formes modernes, n’a pas disparu. Elle continue de menacer nos compatriotes. Je pense aux morts de Marrakech il y a quelques jours, aux otages d’Afghanistan dont la détention est inhumaine, aux prisonniers d’Al Qaïda au Maghreb Islamique, à notre concitoyen toujours retenu en Somalie. Je pense surtout à nos soldats qui, en Afghanistan, en Lybie, en Côte d’Ivoire, au Niger et au Mali risquent actuellement leur vie avec dévouement et courage. Sur ces conflits, il y aurait beaucoup à dire : Que faisons-nous dans la vallée de la Kapisa ? Pourquoi la Lybie et pas la Syrie ? Devions-nous intervenir à Abidjan ?
Ce n’est pas aujourd’hui le temps de ces questions. Elles viendront dans un an. Notre rassemblement est celui de la mémoire et du souvenir pour des dizaines de millions de morts, sur les champs de bataille et dans les camps, en Europe et dans le reste du monde, civils et militaires auxquels nous ne devons pas oublier d’associer dans le respect le plus absolu les jeunes gens qui aujourd’hui donnent leur vie, de plus en plus nombreux, dans l’armée française, à ceux qui sont blessés, mutilés, invalides et qu’il faut soutenir.
Nous avons nous aussi à notre échelle modeste nos combats à mener : Contre l’insécurité et il faut remercier les forces d’autorités qui font reculer le crime, la délinquance et le danger et se féliciter du coup de filet qui a retiré de nos rues au début de la semaine 20 personnes qui bafouaient la loi, l’ordre public, la tranquillité des Rolivalois. J’invite chacun à ne pas transiger avec ces déviances et ces incivilités, de la voie de fait la plus caractérisée à la circulation de scooters sur la dalle. Mes consignes sont claires : la fermeté.
Contre cette violence sociale que sont le chômage et la précarité. Pour 16 000 habitants nous avons 1350 demandeurs d’emploi, c’est énorme et l’annonce concernant M-Real n’arrangera rien. Nous devons y répondre par le renouvellement urbain, le développement économique et la relance de l’emploi. Nous y travaillons tous les jours, mais pour réussir il faut être unis dans la ville et autour de la ville. Je vois progresser trop lentement certains dossiers dont celui d’un date center de la BNP qui apporterait de l’attractivité pour notre territoire, des recrutements, de l’argent pour notre service public et même sur proposition des verts un peu d’écologie.
Contre le racisme et la xénophobie, rien ne nous fera renoncer à être une ville cosmopolite où le départ soudain d’une femme que nous aimions, Mme Sow, nous brise le cœur, et sans que nous nous préoccupions du lieu de sa naissance, nous réunit autour de sa fille Aminata, notre collègue. Alors que le Front National qui avait deux élus et attirait parfois 15% des voix à reculé à Val-de-Reuil, la peste bleue marine rassemble 38% des voix à Louviers et 56% à Vironvay. Rien ne nous fera renoncer à être une ville généreuse et ouverte, non pas comme une intercommunalité froide à force d’être inamicale ou comme une Europe désincarnée à force d’extensions technocratiques. Je crois aux solidarités de proximité pour ceux qui veulent aller plus loin avec la CREA, Danthiady, Poses, Le Vaudreuil ou Léry, Workington, Stzum ou Ritterhude, cette belle priorité que la légèreté d’un directeur d’école, qui a oublié d’accueillir nos amis allemands, comme si on pouvait oublier l’amitié, a failli abîmer. Ce n’est pas la Nation qui nous appartient, c’est nous qui appartenons à la Nation et cela ne peut se faire que sur un double mouvement d’identité et d’accueil, pas dans l’autarcie ou le rejet.
Pour tous ces combats, il faut reprendre les mots de Stéphane Hessel, mais dans l’ordre dans lesquels ils ont été prononcés. « On a raison de se révolter ». Indignez-vous. Mais il faut agir avec ceux qui travaillent dans la ville, résistent, transforment. Alors ne vous mettez pas de côté, et selon les idées de votre choix : « engagez-vous » et suivez les mots de Césaire qui disait : « Mon nom offensé, mon prénom humilié, mon état révolté, mon âge l’âge de pierre, ma race la race humaine, ma religion la fraternité ».