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26 AOUT 2017

Ceci est notre Théâtre : venez et aimez le tous ! Le 5 octobre prochain y sera dévoilé la programmation de sa nouvelle saison. Je vous y attends (très) nombreux.

Il est des salles qui ne ressembleront jamais à un théâtre. Jamais. On aura beau y installer des projecteurs, des fauteuils et une scène, cela ne changera rien. Qu’importe que pour donner le change, du mieux que l’on peut, on y déchire des tickets à l’entrée, on y vende des programmes à l’entracte. Ces efforts resteront vains. On tentera bien de cacher ces boites à chaussures sous des plafonds de stuc, derrière des façades de marbre. Les applaudissements battront toujours creux, les rappels sonneront toujours faux. On trouve plus souvent de la lessive que du talent dans les grands barils d’hypermarché. Quand bien même s’évertuera-t-on en fermant les yeux, en serrant les lèvres, à imaginer que, après la sonnerie, les lustres s’éteignent, le brigadier frappe les trois coups et le rideau se lève, la magie ne prendra pas. Comment sous des néons blafards convoquer la joie, la peine et l’indéfinissable ? Cosmétique et playback ont leurs limites. La fête ne se décrète pas. C’est atroce, c’est injuste, mais pas un instant, ces espaces polyvalents, ces forums faits pour tout, faits pour rien, ne se rapprocheront du Français, du Piccolo, de l’Old Vic, de la Taganka. Pas plus qu’ils ne rattraperont d’un millimètre le Bolchoï, la Scala ou le Lincoln Theater. Ce n’est pas une question de scène à l’italienne. On ne rit pas dans un bunker. On rêve mal dans un cimetière. La médiocrité, la laideur ne pardonnent pas. Malraux l’avait dit en des termes gaulliens : il faut à la culture des palais, des places et des cathédrales. Voilà tout. Melpomène, Thalie et Terpsichore, Calliope, Euterpe et Erato, pour être un peu âgées, ne sont pas si gourdes qu’elles se laissent berner par un décor en carton pâte. Des voix s’y feront peut-être entendre, puissantes et payées, avec le ton que l’on aimerait, les mots que l’on pense attendre, les visages que l’on connaît par la télé. Cela ne suffira pas. « Commediante, tragediante », le manque d’authenticité pue à des kilomètres à la ronde. N’est pas Epidaure qui veut ! La messe est dite. Pas de passion. Pas de petite flamme. Je le répète : ce ne seront jamais des théâtres.

L’Arsenal, lui, est un théâtre. Un vrai. Un beau. Un tatoué. Il l’est en rouge et en noir. En verre, en bois et en acier. Il l’est par sa silhouette courbe et trapue. Il a du muscle et du cerveau. Il l’est par la pente de ses gradins que, de rang en rang, les répliques escaladent quittant l’approbation de l’orchestre pour défier la contestation du balcon. Il l’est par la procession des spectateurs qui, remontant l’avenue des Falaises, s’y dirigent dans l’obscurité qui vient. Comme vers un mystère. Il l’est par le sort qu’il fait aux acteurs accueillis pour un soir comme s’ils étaient de toute éternité membre de la grande famille rolivaloise. Il l’est quand on s’assoit, côté pair ou impair, impatient sans savoir de quoi, persuadé que, de toutes façons, quelque chose se produira, quelque chose de bien et de beau, quelque chose qui nous changera et, insensiblement, nous améliorera. Il l’est par la profondeur de sa scène, la largeur de son plateau, la hauteur de ses cintres, ses justes proportions que l’architecte éclairé d’un nombre d’or subtilement calcula. Il l’est parce que, repère au dehors, repaire en dedans, il enrichit la Ville. Avec douceur, avec amour, il la change. Il l’est par la rumeur, bienveillante, intelligente, rassurante par laquelle la salle vous accueille avant que cela commence. Il l’est par le rire des enfants. Il l’est parce qu’on en franchit la porte sans crainte pour une première fois. Il l’est par ceux qui le dirigent, les deux à la fois, les deux en même temps, le chorégraphe et le metteur-en-scène, ces deux qui vivent leur art et le partagent généreusement. Il l’est par la surprise et l’inattendu. Il l’est par le verre de vin pris au bar, la bouche embrassée et les amis retrouvés. Il l’est par ses murs si jeunes et qui, pourtant, depuis longtemps déjà, ont respiré Brecht et Koltès, Carolyn Carlsson, Beau Geste et Maguy Marin, Racine, puis Tchekov, Caubère et Molière certainement, Homère et Shakespeare évidemment. Il donne du corps au ballet et laisse humaine la comédie. L’Arsenal est un théâtre. Un beau théâtre, c’est l’évidence. Un vrai théâtre, c’est l’important.

Marc-Antoine Jamet

Maire de Val-de-Reuil

Président de la commission des finances de la Région Normandie

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